samedi 11 octobre 2008

Eric Tabuchi - Alphabet Trucks


Petite découverte
de mon passage du jour dans les galeries du marais: un coffret de 26 cartes pour faire apprendre l'alphabet à ma fille par le truchement de la photographie.
J'ai toujours un faible pour les typologies, j'aime le détournement des logos, je retrouve un de mes vieux rêves: faire un imagier pour enfant avec le meilleur de la photographie contemporaine.

lundi 29 septembre 2008

Avedon au Jeu de Paume: le show permanent


"J'ai posé une série de non: non aux jolies lumières, non aux compositions trop apparentes, non à la séduction des poses ou à la narration".


Je passe sur le monde qui se presse devant chaque photo (je n'ai jamais vu autant de gens dans cette partie des Tuileries), sur les débuts 50's - photos de mode et vie parisienne (qui démontrent si besoin en était les intuitions géniales, le sens du mouvement et de la narration dans son travail), ainsi que sur les portraits de personnalités (idem); le tout ayant donné naissance au meilleur (Tim Walker) comme au pire (La Chapelle), par exemple.


Je me concentre sur la série In the American West, LE label profondeur / authenticité d'Avedon.
Le résultat m'a plus fait penser à un casting pour John Deere qu'à un travail documentaire rigoureux et plasticien sur les habitants de cette partie de l'Amérique. Bien sûr, ces photographies sont belles et, comme Avedon le rappelle: "l'exactitude n'existe pas en photographie. Toutes les photos sont exactes, aucunes d'elles n'est la vérité".
Pourtant, en choisisant un traitement sensationnel pour ces personnes ordinaires, il m'apparaît aujourd'hui plutôt daté vs ce que ferait, au hasard, un Alec Soth (hôte du lieu quelques mois auparavant); et franchement en contradiction avec la phrase que j'ai placé en exergue, sur le refus précisément de tout sensationalisme.


Un travail me semble faire exception au show permanant: la série de portraits de son père, réalisée entre 1969 et 1973, alors que celui-ci est rongé par un cancer. (au passage, un autre très bel exemple sur le même thème chez Phillip Toledano, Days with my father).


Bio expresse: né en 1923 à New York, mort en 2004.
Le site officiel, ici, le lien vers un article sur American West, .

mardi 23 septembre 2008

Fashion Magazine par Alec Soth


"While Fashion Magazine has a single photographer-author, it's still a magazine, not a book. So it doesn't follow my usual mode of slow, solitary production. It's collaboration. The ideas for the collaboration were formulated very quickly. I was approached by the folks at the Paris office of Magnum to work on this issue late last year. I immediately said yes. I was a huge fan of the previous two editions (by Martin Parr and Bruce Gilden) and was looking for an excuse to play with fashion . I often say that when I am making a portrait, I'm not "capturing" the other person. If the photograph documents anything, it is the space between the subject and myself. Something similar is at work with Fashion Magazine. I'm not really comfortable saying I know anything about Paris or its fashion world. And I suspect that most fashionable Parisians know just as little about Minnesota. What is interesting is the space between us. My favorite example of this involves Chanel. In Paris, I photographed Karl Lagerfeld at the Grand Palais. In Minnesota, I photographed a girl with a Chanel shopping bag in front of Sally's Beauty Shop. With this magazine, I'm trying to explore the distance between those two places."

Et plein d'autres petites perles sur le blog de Magnum, ici.

Arles suite et fin


Un bon cru Arles 2008?
Pour jouer au petit jeu du "c'était mieux avant", je retiens les éléments suivants:
- Christian Lacroix a, assez logiquement, voulu ancrer le festival dans la ville même. Pour la première fois, des expositions sur les industries salinières, sur l'histoire de la ville, sur les camps d'internement gitans. La fierté des habitants lorsqu'ils vous annoncent qu'une photo de leur famille a été sélectionnée par 'Monsieur Lacroix'.
- De la même façon il a, très logiquement, dédié une part importante du festival aux rapports entre l'image et la mode. Malgré un recours intéressant aux archives, c'est beaucoup plus laborieux; et notamment parce qu'Internet aujourd'hui, nous sature de ce type d'images.
- Dans l'ensemble de la sélection, le choix des exposants ne semble parfois pas exempt de toute compromission: mais que fait donc Jérôme Puch dans cette sélection, si ce n'est en sa qualité de conseiller en communication de la maison Lacroix?
- Pour les reste des lieux d'exposition, et notamment aux Ateliers, la qualité des artistes présentés est selon moi tout à fait conforme à celle des autres années.

En clair: la démarche est sincère, le résultat malheureusement franchement inégal.



Pour finir, quelques notes sur les haltes et pauses du millésime 2008:
- A côté: trop bon version soft, par Jean Luc Rabanel.
- Le barrème: pour peu que l'on choisisse bien son côté, la cuisine est fade mais le décor est beau.
- L'escaladou: le bon plan de Morgane et Stefan, pourtant gastronomes. A fuir!
- Le Méjan: les tajines authentiques et copieux
- Soleileis: LA glace.
- L'Arlatan: maintenant c'est sûr, il faut demander la chambre 6.

dimanche 21 septembre 2008

Arles #3

Jour 3, bon dimanche, mais peu d'applaudissements.

- Espace Van Gogh: photographing clothes, la démarche est certainement sincère, mais où est la photo là-dedans? A lire absolument: le livre d'or. Beau stand de cartes postales à la sortie.
- Bourse du travail: ENSP Promotion 2008. Sung Hee Lee**, un panneau publicitaire vide de message n'est pas pour autant vide de sens; Christophe Mattern, un même lieu et plusieurs temps; Marikel Lahana***, Raphaele veut qu'on achète Eric.



- Cloître St-Trophime: d'Arles à la maison Lacroix est un pêle mêle offrant peu d'intérêt des inspirations du couturier; Jérôme Puch, est le dir com de la maison Lacroix, il porte un hommage égotiste au polaroïd, on en pleure; Richard Avedon***, In memory of the late Mr and Mrs Comfort. A fable by R.A., en 1995, les adieux du photographe au monde de la mode; Katerina Jebb, des photos tirés de scans?



- Museon Arlaten, Patrick Box: grands tirages en extérieur sur le site industriel des salinières de camargue, inspirations entre les dunes de Namibie et les corons du Nord.
- Fameuses courtisanes: lorettes, biches ou demi mondaines, elles sont les faces fichées de la société corsettée du Second Empire. Découverte pour l'occasion des cartes de visites de l'époque: adorables petits clichés mis à la mode par l'atelier Disdéri.
- Espace Jeunes talents SFR: Julot, images très lêchées et rétro; Didier Illouz**, l'homme est un animal; Benjamin Roi, des corps saturés, déchirés par la quête du beau.


lundi 15 septembre 2008

Arles #2


Jour 2: Les Ateliers, beaux, chics, délicats, et toujours reconnaissables.

- Salle 1: Tim Walker***, le story teller de la mode; Charles Fréger***, l'uniforme uniformise mais sans réduire l'individu; Françoise Huguier**, les appartements communautaires, la communauté suggérée par l'absence et les objets accumulés; Jean-Christian Bourcart, série navrante de ses photos de mariage refusées - tout le monde n'est pas Martin Parr; Achinto Bhadra, "autoportraits" de jeunes filles indiennes; Vanessa Winship*, superbes tirages N&B d'écolières turques.




- Salle 2: Samuel Fosso*, à 13 ans il ouvre son premier studio photo et envoie à sa grand mère des autoportraits, déguisé en personnalités africaines; Pierre Gonnord***, tire les portraits d'un monde marginal à Madrid, ses tirages rapellent Rubens et Velasquez; Patrick Swirck* présente une lettre photographique, quotidienne, à destination de son ex; Georges Tony Stoll, aucun souvenir.


- Salle 3: Joachim Schmid, collection de photos oubliées, endommagées à Arles; Joël Bartoloméo, 2 vidéos mêlant actualités et histoire personnelle, ah bon ?; Grégoire Korganow, à côté des photos de backstage, une série sur les femmes de prisonniers et notamment la séquence**, en 5 photos, d'une attente - explosion de joie - désespoir; Guido Mocafico***, des natures mortes, mais de vraies photographies, qui semblent des tableaux; Grégoire Alexandre, jeune photographe de mode.


- Salle 4: Prix de la découverte. Debbie Fleming Caffery*, photos des bordels mexicain, une femme, une main sur sa tête; Pieter Hugo (Lauréat)**, montreurs de hyènes et chasseurs de miel; Ethen Levitas* photographie les rames du métro new-yorkais; Danilo Giuliani, fait des photos de mode; Jamie Isaia, autoportraits perturbés assez peu perturbants; Cameron Smith, du blog de mode au studio photo; Jerry Schatzberg*** ah oui! qu'elles sont belles ses années 60; Stéfanie Schneider**, je connaissais les photos, mais pas l'ampleur du projet, à suivre; Nigel Shafran, pas de souvenir; Marla Rutherford, photos kitsch de fétichistes kitsch, les deux effets s'annulent; Martina Sautter, pas de souvenirs; Angela Strassheim* un père et son fils se peignent, devant le miroir; Leila Mèndez nous montre ses amis au milieu de la nature; Daniel Riera et David Urbano, pas de souvenirs.



dimanche 14 septembre 2008

Arles #1


Comme chaque année
, un long week end à Arles, pour profiter de la ville et se gaver d'expos photos. En 3 jours, quelques notes sur ce que j'y ai vu (j'ai même fait un petit classement comme les guides Michelin).

Jour 1: en arrivant du train
- L'archevêché: photos d'Arles réunies à partir des photos de Lucien Clergues***, images d'archives, images des bombardements, collection des carnets d'enfermements** du camp gitans qui a existé en Camargues, et photos des années d'après guerre


- Le Capitol: Exodus, photos retrouvées d'un cargo-cage qui parti de Sète, se retrouva bloqué à l'entrée d'Israël; Jeffrey Silverthorne**, années 70s, ami de Diane Arbus, photos mêlant le style documentaire et la mise en scène onirique, belle série sur la morgue, sur les autoportraits; Léa Crespi, autoportraits, travail sur l'espace et le corps; Jane Evelyn Atwood**, photos sur Haïti, belle utilisation du clair-obscur.


- Eglise Ste-Anne, Paolo Roversi*: de la mode, Guinevere ressemble à Ethel


- Eglise des frères pêcheurs, Peter Lindbergh*: il en fait de belles sur la plage de Beauduc; on connaît déjà, mais gros faible pour Anna Karina et Helena Christensen en petites chattes espiègles.

mercredi 25 juin 2008

Eric Nehr


Les monochromes d'Eric Nehr me sont revenus en mémoire en rédigeant le post sur Laura Henno...dont le collectif Qubogas est représenté par la gallerie Anne Barault qui présente également le travail de ce photographe depuis 1998.

Photographe de mode, sélectionné au festival de Hyères en 1999, Eric Nehr est également reconnu dans le monde de l'art contemporain pour ses séries de portraits, notamment présentées à travers deux expositions, en 2004 et 2006.

On trouve beaucoup de texte élogieux sur ces photographies (1, 2). La première série de 2004: des portraits qui mettent en avant la finesse des corps et des attitudes, une ellipse sur les regards, singulièrement absents; un focus déjà, sur le corps en tant que matière; l'utilisation du fond (qu'il peint lui-même pour chaque sujet) comme élément complémentaire chargé de souligner plutôt que de contraster.


Deuxième série en 2006, qui va plus loin et plus fort: les fonds et les corps se mêlent et se brouillent, un détail ressort, prévaut, et semble une oeuvre déconnectée et iréelle...Eric Nehr réussi à mon sens deux choses essentielles à travers ce travail: la lumière ne contraste plus, elle souligne; le corps de matière, tourne à l'abstraction.



Bio expresse: né en 1964, vit et travaille à Paris.

dimanche 22 juin 2008

Laura Henno

La tentation de l'année dernière; à l'approche des rencontres d'Arles, je reviens un instant sur celle qui remporta le prix de la découverte en 2007.

Le plus beau texte sur les photographies de Laura Henno est sans doute celui de la commissaire Marie-Thérèse Champesme, que l'on trouve sur le site de l'artiste.
Dans ces photos entre fictions narratives et réalité figée, la photographe assure laisser toute liberté à ces adolescents qui ne posent ni ne savent à quel moment elle déclenche l'appareil. C'est peut-être de la conjonction d'une attention minutieuse portée à l'environnement, d'un traitement de la lumière qui isole par les contrastes et de sujets abandonnés dans ces cadres souvent hostiles que naît le sentiment très fort de toucher de près tous les affects de l'adolescence.

Bio expresse: française, née en 1976, vit à Lille.
Egalement: films, et travail collectif avec Qubogas


samedi 21 juin 2008

Coiffures pour dames de Fabrice Guyot


"Leur bistrot à elles": Fabrice Guyot, photographe, et Claire Judrin, journaliste, ont écumé entre 2003 et 2007 les salons de coiffures à l'ancienne.

Une fois la porte poussée, les photos frappent de justesse et d'humanité. Il me semble déjà rare de voir des sujets qui traitent de la vieillesse; ici, pas de compassion ou de condescendance, le joli texte de Claire Judrin est l'exact reflet de ces images qui sont belles mais pas prétentieuses, qui manient l'humour mais respirent la dignité, qui pointent le lien social mais suggèrent la solitude.
Je ne dirais pas de Fabrice Guyot qu'il a réalisé un travail artistique d'exception (d'ailleurs j'aime beaucoup moins ses autres images), mais au-delà de la qualité réelle des photos, "Coiffures pour dames" traite de manière réjouissante d'un sujet qui est souvent difficile, avec ce fragment d'humanité qui devrait habiter toutes séries documentaires.

Et comme je n'arrive pas à choisir, ci-dessous quelques photos; les autres sont ici.
Et d'autres séries qui portent sur la vieillesse, .



dimanche 15 juin 2008

Lucie & Simon


Je découvre Lucie & Simon à rebours. En parcourant les recensions qui font écho au PPP 2008, je suis littéralement tombé sur cette photo. Le sentiment de vertige, la tension mise en scène entre l'impression de voyeurisme et la douceur qui émane de la rêverie de cette voisine, la partition du cadre et les oppositions axiales qui suggèrent l'intérieur réconfortant et chaleureux face à une ville qui sombre dans l'étrange et l'inquiétant, la nostalgie profonde et douce de cette photo enfin, me projettent un soir d'été, au moment ou la ville retrouve la tiédeur du soir et bruisse d'une activité au ralenti.

Quelques clics m'ont appris que Lucie et Simon ont 27 et 22 ans, sont française et allemand, et mènent depuis 2005 un projet photographique sur l'homme et la société au 21ème siècle (avec un seul appareil...). La photo ci-dessus a pour titre 'Window on courtyard' et appartient à la série Scenes of life.
Machines et Earth Vision sont deux autres séries, à découvrir sur leur site.


Découvrir après coup ces 2 précédentes séries a singulièrement renforcée l'impression que m'avait faite 'Window on Courtyard'. Que ce soit dans le lien entre l'homme impuissant et l'architecture démesurée et anarchique que montre 'Waiting for the end' ou dans le rapport entre l'homme consommateur et l'industrie agro-alimentaire dans 'Production prototype', ces photographies montrent un individu retranché de son humanité et dépassé par les moyens qu'il a du mettre en œuvre pour assurer son existence.


Dans ce contexte, la série Scenes of life s'enrichit des réflexions précédentes, parce que la question du rapport entre l'individu et son espace est bien au coeur du sujet, et parce que les réponses proposées ici me semblent plus optimistes.

Combien ça coûte? C'est ici et .

Bio expresse: nés en 1981 et 1986, vivent et travaillent à Paris.

vendredi 13 juin 2008

Candida Höfer vs Tali Amitai-Tabib



La première est allemande, élève de la prestigieuse Académie de Arts de Düsseldorf, jouit d’une réputation internationale et expose dans tous les musées d’art contemporain depuis plus de 30 ans ; la seconde est israélienne, autodidacte, et depuis quelques années, expose plus modestement, à la galerie parisienne Olivier Waltman dernièrement. Toutes deux photographient les lieux de la culture (occidentale), dans une approche documentaliste.


Même souci de rigueur, absence de tout personnage, importance de la lumière, identité des thèmes (notamment le rapport entre les productions culturelles et leurs espaces de représentation)…tout tend à mettre les deux artistes sur le même plan. Du coup, antériorité et notoriété obligent, Tali Amitai-Talib apparaît à première vue comme la photographe qui ‘fait’ du Candida Höfer, on peu plier.
À y regarder de plus près, les choses changent: en observant comment chacun des éléments cités plus haut ajoutent à la démarche artistique, on voit se dessiner deux manières bien distinctes de produire ce qui semble être la même photographie.


Candida Höfer est une ancienne élève de Bernd Becher. Son rigorisme, ses photos au grand angle qui embrassent des espaces majestueux, son obsession de la lumière, servent à produire des images monumentales. L’absence de présence humaine est le moyen de porter au regard la force et la puissance qui naît de lieux où l’architecture ordonnée, mise à nue, abrite le fruit du génie humain. Prises systématiquement de face, ces photographies sont l’occasion pour le spectateur de découvrir « les lignes de fuites» de ces espaces sacralisés.


Chez Tali Amitai-Talib au contraire, l’approche de ces lieux de culture est beaucoup plus personnelle et subjective. L’absence de personnages n’est plus la condition pour montrer l’ordre des choses, mais le moyen de proposer une vision intimiste et retranchée du monde extérieur. La lumière ne rythme plus, elle souligne ; la rigueur ne fige plus, elle met à jour le léger tremblement qui trahit l’émotion personnelle ; les angles de vue s’autorisent le détail. Photographiant les musées de Florence, Tali Amitai-Talib explique: « dans ces lieux, que j’ai scrupuleusement veillé à vider, la trace de l’homme et les mouvements de lumière apparaissent comme les métaphores du savoir et de la création ».


Son dernier travail sur les bureaux d’écrivains et poètes israéliens est certainement le plus représentatif de sa démarche. Ici le lieu de production de l’œuvre, purement privé, atteint le comble de l’intime et de l’éphémère, en opposition flagrante avec l’œuvre, universelle et éternelle ; Tali Amitai-Talib trouve ici le sujet idéal pour laisser affleurer l’émoi et le respect profonds que l’on sent chez elle face à toute manifestation de cette puissance créatrice qu’elle a mis des années à maîtriser elle-même.

Là où Candida Höfer démontre, Tali Amitai-Talib témoigne.


Peu d'articles sur Tali Amitai-Tabib, voir sa galerie parisienne et une galerie israélienne.
Pour Candida Höfer, voir ici, ici, et .